"Dans mon métier, on explore l'inconnu"
Vos travaux dans les nanosciences ont-ils débouché sur des applications industrielles ?
Il en existe dans l’optique, en particulier dans les lasers à cascade quantique, et dans les biocapteurs en recherche biophysique et biomédicale, pour l’analyse des mouvements des protéines et des biomolécules. On en trouve ainsi dans des sondes biomédicales miniaturisées et des systèmes microfluidiques.
Quelles autres applications pourraient voir le jour ?
Certains industriels croient au potentiel de mes travaux en chimie polaritonique, permettant des modifications de réactions chimiques. Modifier des molécules ou changer le rendement d’une réaction à travers des champs magnétiques semble de la science-fiction. Mais nos techniques peuvent contrôler et favoriser la génération d’un produit par rapport à un autre dans le cadre d’une réaction chimique, évitant les coproduits qui ne sont pas tous valorisables. Dans mon métier, on explore l’inconnu. Cela peut déboucher sur des applications bien réelles, même si passer de la recherche fondamentale à l’industrie prend souvent vingt à trente ans.
Vous avez fondé en 2001 la société n-Tec. Qu’en est-il ?
Ce projet est à l’arrêt. Avec deux chercheurs en Norvège, nous avions développé cette start-up à partir de mes découvertes sur la première méthode de synthèse en masse de nanotubes de carbone. Pendant dix ans, nous avons développé un savoir-faire de nanotubes à l’arc, matériaux structurellement les plus solides au monde qui, en très petite quantité, renforcent les composites. Nous avons collaboré avec de grandes entreprises. Mais changer les propriétés mécaniques des matériaux nécessite un processus très long d’approbation. Nos clients potentiels reconnaissaient l’amélioration par rapport aux nanotubes existants, mais n’étaient pas prêts à investir. Nous sommes arrivés trop tôt pour le marché et avons arrêté. Mais le savoir-faire est gardé bien au chaud.